L’engagement dans les soins en collaboration en santé mentale jeunesse pour les familles migrantes : des lieux cliniques ancrés dans leurs contextes institutionnel et sociopolitique
Objectifs:
Cet article vise à combler certaines lacunes dans la littérature concernant les conditions propices à des soins en collaboration de qualité en santé mentale jeunesse (SMJ) pour les jeunes migrants et leurs familles, dans les services de première ligne. Il examine les facteurs susceptibles de favoriser l’engagement des familles migrantes dans les services, en tenant compte des dimensions liées à la rencontre clinique, aux enjeux systémiques et aux questions institutionnelles/sociopolitiques.
Méthode:
Utilisant un devis multiphase en méthodes mixtes, l’article présente séquentiellement les résultats qualitatifs et quantitatifs spécifiques aux familles migrantes, d’un vaste programme de recherche sur les soins en collaboration en SMJ dans des quartiers culturellement et socioéconomiquement diversifiés. Ces résultats proviennent de données collectées à Montréal au cours de la dernière décennie par le biais de questionnaires, d’entrevues semi-structurées, de groupes de discussion, d’observation participante et de documentation. Les participants à la recherche étaient des enfants, des adolescents et des parents de familles migrantes, des cliniciens et des gestionnaires.
Résultats:
Les résultats suggèrent que le macrosystème sociopolitique et institutionnel structure l’espace de la clinique et influence le processus de soins. En particulier, les réformes successives du système de santé posent des défis de taille aux institutions et aux équipes en SMJ quant à leur capacité à créer un environnement favorable à la continuité des soins et au partenariat interinstitutionnel et à la collaboration interprofessionnelle, des facteurs associés à l’engagement des familles dans les soins. Cet engagement est également tributaire des représentations que les familles migrantes se font de la santé mentale et des services. Ces représentations sont façonnées par leur expérience des soins, mais aussi par ce que leur environnement socioculturel et les discours publics leur permettent d’imaginer de ces services. Cela invite à considérer une intégration de dimensions culturelles et sociopolitiques dans le concept d’engagement. Enfin, les résultats suggèrent également que les écoles jouent un rôle important pour favoriser l’engagement dans les soins de santé mentale.
Conclusion:
La qualité des soins de santé mentale pour les enfants et adolescents migrants dépend de l’engagement des familles dans les services, et aussi de l’engagement réciproque des cliniciens et des institutions. Les contextes politiques où des tensions entre les groupes majoritaires et minoritaires sont présentes peuvent également faire obstacle aux soins. Étant donné que les familles migrantes s’engagent moins dans les services par rapport aux familles non migrantes, ces considérations appellent à un examen important des moyens pour faciliter l’engagement des familles migrantes dans les soins en collaboration en SMJ. L’article propose certaines avenues pour favoriser cet engagement.
Membres et équipe SHERPA
Lucie Nadeau
Division de psychiatrie sociale et transculturelle et pédopsychiatrie, Université McGill
Janique Johnson-Lafleur
Chercheure d'établissement, Institut universitaire SHERPA, CIUSSS Centre-Ouest-de-l'Ile-de-Montréal
Annie Jaimes
Professeure, Département de psychologie, Université du Québec à Montréal (UQAM)